Cigéo : mission accomplie pour la conférence de citoyens
Dans le cadre de la concertation sur la phase industrielle pilote du projet Cigéo, 17 personnes tirées au sort ont été invitées à participer à une conférence de citoyens. Elles ont rendu leur avis en juillet dernier. Retour sur cette expérience de démocratie participative.
Si le projet Cigéo est autorisé, il démarrerait par une phase industrielle pilote. Une phase qui se déroulerait durant les premières années de construction et de fonctionnement du stockage et pendant laquelle les fonctionnalités techniques, organisationnelles et de gouvernance de Cigéo seraient testées en conditions réelles.
Pour impliquer les citoyens et réfléchir d’ores et déjà collectivement aux enjeux de cette phase importante pour le déploiement de Cigéo, l’Andra a organisé au printemps dernier une conférence de citoyens. « Parce que les décisions sur Cigéo engagent la société tout entière pour très longtemps, elles ne peuvent pas résulter d’un face-à-face entre l’Andra et l’État, explique Pascal Leverd, directeur adjoint du projet Cigéo. Elles doivent être le fruit d’un travail collectif. Il est donc essentiel d’instaurer une dynamique de participation du public, une “gouvernance du projet” qui ne s’essoufflera pas dans le temps. »
Se former et échanger
En complément d’autres dispositifs de concertation sur la phase industrielle pilote, la conférence de citoyens permet aux participants, par l’alternance de temps de formation et d’échanges, de se forger une opinion éclairée sur le sujet. Représentatif d’une diversité de la population française, le groupe de citoyens était composé de 17 personnes tirées au sort, aux profils très variés (par l’âge, le lieu de vie ou encore le diplôme).
L’objectif des participants : donner un avis collectif à l’Agence et aux décideurs publics sur la phase industrielle pilote, et des recommandations sur la façon dont elle doit être menée pour répondre aux attentes de la société. Au cours de 3 sessions de 2 à 3 jours, ils ont eu l’occasion de rencontrer 32 intervenants issus de différents horizons : élus, scientifiques, économistes, sociologues, entreprises, associations. Pour garantir l’indépendance de la démarche, l’Andra a confié son organisation à un comité de pilotage indépendant.
Bâtir la confiance dans le projet Cigéo
Les 17 citoyens ont rendu leur avis au début de l’été. Dans ce document, ils examinent le déploiement de la phase industrielle pilote et présentent des recommandations sur des thématiques variées : impacts sur le territoire, processus décisionnel, mémoire du site, communication et participation du public, suivi environnemental et sanitaire, protection des travailleurs, réversibilité, mémoire, solutions alternatives.
Selon Claude Brevan, la présidente du comité de pilotage : « Le sérieux du groupe et sa rapidité à saisir les principaux enjeux ont démontré que des personnes a priori néophytes sont à même de se saisir d’un sujet difficile à condition de recevoir une information leur donnant accès à une connaissance éclairée des principaux aspects du projet. » Gaëlle, une participante, témoigne également dans ce sens : « Je ne m’attendais pas du tout à recevoir autant d’informations, à les comprendre, à les analyser. Nous devrions tous faire ce genre d’exercice, prendre en main des sujets et en débattre, ça nous impliquerait plus dans la vie collective. »
L’Andra s’est engagée à répondre à l’ensemble des recommandations contenues dans l’avis collectif. Elles permettront d’éclairer l’Agence pour finaliser le dossier de demande d’autorisation de création de Cigéo et d’orienter les modalités de dialogue et de gouvernance à venir autour du projet.
Des citoyens impliqués - Témoignages
Gaëlle, 51 ans, Var
Quand j’ai reçu le coup de fil, je n’y croyais pas tellement, et j’ai raccroché en disant “je ne sais pas de quoi vous parlez”. Après le coup de téléphone, je me suis renseignée sur les déchets nucléaires. Je me suis dit que ça pouvait être intéressant de donner mon avis citoyen, d’apprendre sur ce sujet qui est très important. Je ne m’attendais pas du tout à recevoir autant d’informations, à les comprendre, à les analyser. Nous devrions tous faire ce genre d’exercice, prendre en main des sujets et en débattre, ça nous impliquerait plus dans la vie collective.
Pascal, 60 ans, Haute-Garonne
J’ai accepté de participer pour donner un avis et participer à des discussions avec des gens qui partagent les mêmes préoccupations que moi. Je n’avais aucune connaissance sur les déchets nucléaires et au travers de ces trois week-ends, j’ai pu appréhender cette problématique grâce à toutes les informations qui nous ont été communiquées. La réflexion collective nous a permis de confronter des avis divergents, qui viennent d’origines différentes, et de faire évoluer nos positions. C’est une des dimensions très enrichissantes de la conférence des citoyens.
Claude Brevan, présidente du comité de pilotage
L’expérience fut passionnante parce qu’une conférence de citoyens est une aventure humaine qui incarne le concept souvent un peu vague du “vivre ensemble”, c’est-à-dire s’écouter, s’exprimer et débattre sans jamais porter de jugement sur ceux qui défendent une position différente de celle que l’on croit juste. » Le sérieux du groupe et sa rapidité à saisir les principaux enjeux ont démontré que des personnes a priori néophytes sont à même de se saisir d’un sujet difficile à condition de recevoir une information leur donnant accès à une connaissance éclairée des principaux aspects du projet.
Un regret : le refus des associations impliquées depuis longtemps dans le projet de venir présenter leurs positions, débattre avec des experts porteurs d’analyses différentes et répondre aux très nombreuses questions que leur auraient posées les membres du panel. Il a fallu s’adapter et les citoyens ont approfondi eux-mêmes les aspects polémiques qui étaient à l’origine des oppositions au projet mais en dépit de tous les efforts déployés, cela n’a pas totalement remplacé la richesse de débats contradictoires. C’est dommage.