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Kri-Terres, un projet pour mieux évaluer la radioactivité des sols

Soutenu par le programme d’Investissements d’avenir et accompagné par l’Andra, le projet Kri-Terres vise à faciliter les opérations de démantèlement d’installations nucléaires et d’assainissement de sites pollués en améliorant les capacités de diagnostic des sols contaminés par la radioactivité. Il fait appel à plusieurs disciplines : la géostatistique, l’hydrogéologie et la modélisation numérique.

Mesures d’infiltrométrie réalisées afin de déterminer les propriétés d’écoulement du sol.

Réduire l’ampleur et le coût des campagnes de reconnaissance des sols contaminés par la radioactivité en s’appuyant sur des outils de modélisation, tout en garantissant une caractérisation pertinente, c’est tout l’objectif du projet Kri-Terres, piloté par Mines ParisTech. Il associe pour cela les disciplines complémentaires de trois institutions scientifiques : la géostatistique d’Armines (Mines ParisTech) ; la modélisation et les simulations d’écoulement de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) ; la caractérisation des propriétés des sols du laboratoire Géosciences Paris Sud (GEOPS). 

Une méthodologie innovante

Aujourd’hui, pour évaluer les concentrations d’éléments radioactifs dans un sol et délimiter une zone à décontaminer, différentes techniques sont utilisées (forages, cartographies aériennes, etc.). Des solutions qui ne sont pas toujours adaptées à tous les types de chantier d’assainissement, notamment en raison du déplacement des éléments radioactifs en fonction de la composition des terrains et de la présence de cours d’eau. Le projet Kri-Terres propose donc de combiner deux démarches scientifiques afin de mieux tenir compte à la fois de la migration des éléments radioactifs dans le sous-sol et de ses caractéristiques géologiques : la modélisation physique de la migration de la radioactivité, d’une part, et la géostatistique pour estimer la concentration, d’autre part.  « Le sous-sol n’est pas uniforme, il est perméable et poreux. Les taux de sable, d’argile et de limon varient d’un endroit à l’autre, et cette variabilité entraîne des incertitudes : il faut pouvoir les prendre en compte quand on veut cartographier les concentrations », commente Chantal de Fouquet, directrice de recherche en géostatistique à Mines ParisTech. « Jusqu’à présent, les méthodes utilisées pour estimer les concentrations d’éléments radioactifs ne prenaient pas en compte leurs déplacements, ni les incertitudes liées aux caractéristiques du sous-sol. » 

« La méthodologie développée dans le cadre de Kri-Terres ouvre de nouvelles perspectives en termes de réhabilitation des sols et des environnements contaminés », souligne pour sa part Jean-Charles Robinet, en charge du suivi du projet à l’Andra. Son application permettra de mieux estimer les volumes de terre à excaver, de réduire les incertitudes liées au sous-sol, et de mener des campagnes d’échantillonnage plus efficaces. » 

Un projet en trois phases

Modélisation numérique du développement d’un panache de contamination.

Le projet a débuté en 2017. Une première phase, très théorique, a consisté à mettre au point un outil mathématique pour cartographier les écoulements dans le sous-sol et calculer les concentrations en fonction des caractéristiques du terrain. « Ce variogramme permet de modéliser les déplacements des radioéléments dans le sous-sol sans recourir aux sondages. Le résultat produit va refléter ces déplacements : c’est toute l’originalité de la méthodologie du projet Kri-Terres, que l’on appelle le krigeage avec variogramme numérique », détaille Chantal de Fouquet.

Dans une deuxième phase expérimentale, l’équipe a appliqué ses outils à des scénarios virtuels de contaminations et de réhabilitations de sites. Ces scénarios se sont appuyés sur trois sondages effectués par le laboratoire GEOPS dans la formation géologique des sables de Fontainebleau, une région non contaminée, composée de couches de sable, de limon et d’argile. « Notre idée consistait à prendre des échantillons dans un contexte géologique qui ressemble à celui des installations nucléaires en bord de fleuve, pour en déduire les paramètres des sols. En injectant ensuite les informations que nous obtenons dans le variogramme, nous pouvons mieux modéliser l’évolution des concentrations d’éléments radioactifs du sous-sol dans l’espace et le temps », explique Chantal de Fouquet.

Des gains en termes de sûreté et de coûts

Enfin, la dernière étape a consisté à appliquer cette méthodologie à des sites déjà réhabilités ou en voie de l’être, grâce aux données fournies par l’Andra et l’IRSN. L’étude de ces cas réels a permis d’identifier les gains en termes de sûreté et de coûts. 

« La réussite du projet s’explique largement par la mise en commun de toutes les compétences issues de plusieurs disciplines. Tout au long du projet, les trois partenaires ont maintenu un lien étroit entre eux et avec l’Andra qui leur a facilité l’accès à ses bases de données », précise Chantal de Fouquet. « Quand il sera livré, en mars 2022, le projet Kri-Terres offrira une réelle amélioration des outils d’analyse et de diagnostic pour optimiser la réhabilitation des sites contaminés par la radioactivité », conclut Jean-Charles Robinet. 

 

 

29 projets innovants pour la gestion des déchets radioactifs

L’appel à projets lancé par l’Andra et l’ANR dans le cadre du programme Investissements d’avenir a pour but de faire émerger des solutions innovantes pour optimiser, en amont du stockage, la gestion des déchets radioactifs, en particulier ceux issus du démantèlement des installations nucléaires. 29 projets sont soutenus dans ce cadre. Ils portent sur quatre thématiques : la caractérisation des déchets, leur tri et traitement, les nouveaux matériaux de conditionnement, et enfin un volet sciences sociales sur l’innovation et la société.

Le projet Kri-Terres en vidéo