Au labo, un robot qui a du chien !
Les 13 et 14 janvier dernier, le robot SPOT de l’école des Mines de Nancy a fait ses premiers pas dans le Laboratoire souterrain de l’Andra. Très robuste et agile, il pourrait s’avérer d’une grande utilité pour Cigéo, le projet de stockage géologique des déchets les plus radioactifs et à vie longue. Scientifiques de l’école des Mines et de l’Andra se sont retrouvés pour le tester pour la première fois.
Contexte sanitaire oblige, ils ne sont qu’une poignée à accueillir la petite équipe venue de Nancy ce mercredi 13 janvier. Pourtant, la curiosité est grande et chacun veut découvrir SPOT, un robot aux allures de gros chien jaune et noir.
Pourquoi un robot au labo ?
"Les systèmes robotiques pourront avoir toute leur importance dans un milieu complexe et confiné comme Cigéo. Ils pourront faire partie des dispositifs d’auscultation et de surveillance qui seront déployés durant la phase de construction et d’exploitation de Cigéo, rappelle Guillaume Hermand, ingénieur instrumentation à la direction de la Recherche et du Développement.
Le Laboratoire souterrain nous permet d’expérimenter différents systèmes robotisés, comme nous le faisons avec le robot SAM dédié à l’inspection des alvéoles de stockage des déchets les plus radioactifs. Aujourd’hui et demain, nous allons tester quelques unes des capacités de SPOT en milieu souterrain et avec deux étudiants de l’école des Mines de Nancy qui travaillent dessus, dans le cadre de la chaire à laquelle l’Andra participe."
Sous le capot de SPOT
Car la venue de SPOT entre dans le cadre d’une collaboration de longue date entre l’Andra et l’école des Mines de Nancy. Laurent Ciarletta, spécialisé en systèmes cyber-physiques dans les applications notamment de robotique, mène différents travaux avec l’Agence. C’est lui qui a eu l’idée de faire l’acquisition de ce robot, fabriqué par Boston Dynamics.
« C’est un robot vraiment bien conçu. Il intègre beaucoup de fonctions de comportement et de déplacement et peut servir de support à différents types de capteurs. Cela va permettre aux étudiants de se concentrer sur la programmation de fonctions plus élaborées. » Plus agile que les robots sur roues, plus maniable que les mini-drones en environnement sous-terrain, plus solide et polyvalent que les robots « fabriqués maison »…, SPOT intègre également un ordinateur puissant, ce qui va permettre d’en développer les capacités d’acquisition et d’interprétation d’informations de toutes sortes, afin de détecter des anomalies par exemple.
Des capacités d’agilité de SPOT pour des missions spécifiques dans les ouvrages souterrains
À ce stade, SPOT est surtout envisagé pour mener des opérations d’observations et de contrôle tout particulièrement dans les zones moins accessibles par l’homme. « L’agilité de SPOT devrait par exemple lui permettre de se mouvoir facilement sur les déblais générés lors du creusement des galeries afin d’effectuer des mesures au plus près du front de taille », détaille Guillaume Hermand.
D’autres applications seront également testées comme la possibilité pour SPOT de réaliser différents types de mesures avec des capteurs embarqués voire également d'être en soutien pour certaines tâches de maintenances techniques.
Montage
Mercredi matin, deux étudiants en troisième année de master à l’école des Mines de Nancy et un ingénieur emmènent SPOT dans la galerie maquette de l’espace technologique. Première étape : installer un scanner de la société Fugro, prestataire de l’Andra, destiné à réaliser des mesures (relief, géologie…) sur le front de taille des galeries. En effet, même si SPOT est déjà doté de caméras sur chacune de ses faces, ainsi que de capteurs de force, d’accélération, de vitesse et d’orientation, l’intérêt est de pouvoir « l’augmenter » grâce à de nouveaux capteurs de toutes sortes.
Télécommande
Premiers tests de déplacements dans la galerie maquette. Avancer, reculer, se tourner, se coucher, se remettre sur ses pattes, courir, monter et descendre les escaliers, mais également éviter les obstacles et ne pas vous marcher sur les pieds... SPOT est particulièrement agile. Il se pilote grâce à une télécommande. Mais il peut également embarquer une cartographie 3D de son environnement et se diriger seul en se repérant régulièrement grâce à des QR codes disposés sur son parcours. Pour développer son autonomie, les étudiants vont devoir le programmer en utilisant l’intelligence artificielle.
Ronde
Jeudi matin, SPOT est autorisé à descendre dans le Laboratoire souterrain après les vérifications de sécurité. Équipé de son scanner, il découvre tranquillement les lieux.
Front de taille
SPOT arrivera-t-il à se stabiliser sur les déblais du front de taille ? Aucun problème. Grâce aux capteurs de forces installés au bout de ses pattes, il peut affronter des environnements instables, meubles ou caillouteux. De plus, même s’il tombait, sa carrosserie est très solide et il s’en sortirait avec quelques rayures. Mais pour faire le test, l’équipe a préféré retirer le scanner destiné aux mesures… car ce dernier est bien moins résistant aux chocs que SPOT.
Point de vue
Enseignant-chercheur au laboratoire LORIA, maître de conférences à l’école des Mines de Nancy, Laurent Ciarletta, spécialiste en systèmes cyber-physiques dans les applications de robotique, travaille depuis plusieurs années avec l’Andra. Ce contexte a permis d’accélérer l’acquisition de SPOT.
"Quand il est arrivé en septembre à l’école, les élèves ingénieurs se sont très vite approprié le robot qu’ils ont customisé et baptisé SCAR. Il nous sert de support pour les cours et projets en première et deuxième années, notamment sur la programmation en intelligence artificielle dans toutes sortes de domaines : arts, aide à la personne, surveillance… Mais nous avons également quelques étudiants de troisième année qui vont beaucoup plus loin. Grâce à l’Andra, ils ont l’occasion de travailler sur de vrais projets, avec des problématiques industrielles, ce qui est très motivant. Afin de soutenir des projets ambitieux sur les cinq prochaines années, nous avons également mis en place une chaire de formation sur la robotique en milieu complexe avec l’Andra."
Boston Dynamics, l’entreprise qui fabrique SPOT ainsi que d’autres robots, a eu l’idée d’une vidéo de voeux pour le moins originale, qui comptabilise plusieurs dizaines de millions de vues sur YouTube : un ballet de robots.