Interview de Gerard Longuet « La Meuse devait se réinventer »
Député puis sénateur de la Meuse et plusieurs fois élu en Lorraine, Gérard Longuet revient sur l’histoire de l’installation du Laboratoire souterrain dans son territoire d’accueil : la Meuse et la Haute-Marne.
Le Laboratoire souterrain de l’Andra fête ses vingt ans d’activité. Comment avez-vous accueilli ce projet à l’époque ?
La Meuse est un département historiquement agricole et industriel, mais son capital industriel est largement tributaire des savoir-faire du XIXe siècle. Au XXe siècle, si l’agriculture s’est parfaitement maintenue, les activités plus traditionnelles comme la métallurgie, le travail du bois, le textile, ont progressivement disparu. Il fallait que la Meuse se réinvente et pour cela, qu’elle soit associée à des activités nouvelles. Lorsque j’ai appris pour la première fois la nécessité en France de mettre en oeuvre la loi Bataille et de réaliser un laboratoire d’étude sur le stockage en couche géologique profonde des déchets radioactifs HA et MA-VL*, j’y ai tout de suite été très favorable. Être rattaché à une filière d’excellence, durable et à vocation mondiale comme l’électronucléaire était une chance pour le département. Il y avait cependant deux préalables à cette ambition : premièrement, bien sûr, que la géologie permette l’installation du laboratoire ; deuxièmement, que nos entreprises soient étroitement associées au projet et que les grands acteurs de la filière (EDF, CEA, Framatome, Orano) jouent le jeu, et s’installent dans le département.
*Haute activité et moyenne activité à vie longue
Cet objectif a-t-il été atteint ? Selon vous, le Laboratoire de l’Andra a-t-il bénéficié au territoire ?
La réponse est deux fois oui. D’abord, les études géologiques ont lentement mais sûrement fait la démonstration de la légitimité du projet de stockage, devenu Cigéo. En 2000, la Meuse accueillait pour la première fois une activité complètement moderne au bénéfice d’un secteur à très haut contenu technologique et scientifique. À côté des métiers du bâtiment et des travaux publics, du génie civil souterrain, de maintenance, d’entretien ou de gardiennage liés à tous sites de ce type… des emplois d’ingénierie de haut niveau ont également pu s’implanter. En termes de développement économique, le fonctionnement du Laboratoire, l’implantation des sites d’activités d’EDF, du CEA ou d’Orano irriguent désormais l’économie locale, même si les partenariats avec les grands donneurs d’ordre doivent être prolongés et entretenus. Enfin, grâce au Laboratoire souterrain, la Meuse apparaît sous un jour nouveau valorisant les savoir-faire lorrains et la grande culture scientifique de la région. L’Université de Lorraine ou l’école des Mines de Nancy y ont été largement associées et le seront, je l’espère, plus encore…
Quels voeux formez-vous pour l’avenir du Laboratoire ?
Le premier concerne la décision de réaliser le projet Cigéo le plus rapidement possible. Les procédures sont très longues et il le faut, mais un certain nombre de partenaires privés ne s’intéresseront à la Meuse que lorsque le projet sera matériellement engagé. Mon second voeu : que le Laboratoire continue d’exister, non pas comme un élément du centre de stockage mais comme un outil de référence pour l’étude et la recherche sur le difficile sujet de la gestion des déchets radioactifs de haute activité. C’est un sujet commun aux nombreux pays engagés ou qui s’engageront prochainement dans la filière électronucléaire. C’est pourquoi je souhaiterais que ce laboratoire devienne un centre de compétences de pointe où les experts internationaux peuvent se former en s’appuyant sur le savoir-faire accumulé en Meuse et en Haute Marne. Ce serait une vraie fierté.
« Mon second voeu : que le Laboratoire continue d’exister, non pas comme un élément du centre de stockage mais comme un outil de référence pour l’étude et la recherche. »