Projet Valofusion : vers une solution pour décontaminer les déchets métalliques contenant du tritium
Soutenu par l’Andra dans le cadre de son appel à projets innovants (lire encadré), le projet Valofusion vise à développer une solution pour traiter les déchets métalliques contenant un élément radioactif, le tritium, provenant notamment de la future installation ITER.
Actuellement en construction sur le site de Cadarache dans les Bouches-du-Rhône, le réacteur expérimental ITER a pour objectif de créer de l’énergie en reproduisant les réactions de fusion nucléaire qui ont lieu dans le soleil. Une fois en fonctionnement à l’horizon 2035, il générera des déchets métalliques contenant du tritium, un élément radioactif particulièrement mobile dans les matériaux et l’environnement. Leur entreposage provisoire sur site puis leur stockage définitif sur les centres de l’Andra peut donc s’avérer complexe. Pour assurer une prise en charge en toute sûreté, une solution possible consisterait à décontaminer ces déchets au préalable : c’est l’objet du projet Valofusion.
Piloté par le CEA Cadarache, en partenariat avec l’Institut Néel du CNRS à Grenoble et l’entreprise Cyberstar, spécialisée notamment dans la conception de fours à induction, le projet vise à développer un procédé de décontamination par fusion des déchets métalliques contenant du tritium, puis de recyclage de ce radioélément. L’intérêt de cette démarche est multiple : le traitement permettrait de diminuer la teneur en tritium dans ces déchets et d’en réduire le volume à stocker. Le tritium récupéré pourrait par ailleurs être réutilisé dans l’installation ITER en tant que combustible.
Un procédé innovant à plus d’un titre
« Notre procédé comporte deux étapes, explique Karine Liger, chef du projet au département technologies nucléaires du CEA Cadarache. D’abord un traitement thermique du déchet dans un four de fusion dit à “creuset froid” : le métal est fondu grâce à un champ électromagnétique, tandis que les parois du four sont refroidies. Cela assure une semi-lévitation du métal fondu, limitant ainsi le contact avec les parois du four, et donc la contamination. Cette première étape de traitement thermique permet de séparer le tritium du métal, en faisant passer ce radioélément sous forme gazeuse. L’extraction du tritium est renforcée par un dispositif de “bullage” qui consiste à faire passer un gaz dans le métal en fusion, ce qui devrait permettre d’augmenter sensiblement le taux de décontamination en tritium. Dans une seconde étape, le four de fusion est couplé avec ce qu’on appelle un “réacteur catalytique à membrane”, qui permet la récupération du tritium sous une forme compatible avec son utilisation ultérieure. »
De la validation du procédé au prototype préindustriel
Lancée en octobre 2016, la première phase du projet Valofusion a consisté à valider la faisabilité et l’efficacité du procédé de fusion. « Les essais sont en cours dans les locaux de l’institut Néel à Grenoble sur des échantillons non radioactifs. Parallèlement, nous sommes en train d’installer un deuxième prototype de four dans notre laboratoire au CEA de Cadarache, pour démarrer les essais sur des échantillons de déchets métalliques contenant du tritium, à partir de décembre 2018 », précise Karine Liger. La deuxième phase se déroulera de l’été 2019 jusqu’en février 2020 au CEA et sera consacrée à la validation du bon fonctionnement entre le four et le système de récupération du tritium. Enfin, la dernière étape consistera à dimensionner un prototype à une échelle représentative, capable de traiter une dizaine de kilogrammes de déchets (soit une échelle 1/10 par rapport à un procédé industriel). Elle devrait être achevée en octobre 2020, date de fin du projet Valofusion.
Pour en savoir plus : Fiche Valofusion
28 projets innovants
Valofusion fait partie des 29 projets soutenus dans le cadre de l’appel à projets, lancés par l’Andra en 2014 et 2015, sur l’optimisation de la gestion des déchets radioactifs de démantèlement. Cette démarche a été réalisée avec la collaboration de l’Agence nationale pour la recherche (ANR) et le soutien financier du programme d’Investissements d’avenir. Les projets soutenus couvrent quatre domaines : la caractérisation des déchets, leur tri et leur traitement, les nouveaux matériaux de conditionnement, ainsi qu’un volet de sciences humaines et sociales sur l’innovation et la société.