Quel avenir pour les déchets TFA ?
Plusieurs projets innovants sont sur les rails pour optimiser, en amont du stockage, la gestion des déchets radioactifs issus du démantèlement des installations nucléaires. En voici quelques exemples.
Un Technocentre pour la valorisation des aciers très faiblement actifs
Une importante partie des aciers présents dans les déchets TFA pourrait être valorisée dans le cadre du projet « Technocentre », porté par EDF et Orano pour la création d’un centre de valorisation des aciers à Fessenheim, près de la centrale nucléaire en démantèlement.
« Nous prévoyons un traitement des aciers par fusion qui permettrait de valoriser 85 % du tonnage des déchets TFA métalliques constitués d’acier », explique Olivier Giraud, directeur du projet chez EDF. « C’est un projet innovant qui met en œuvre très concrètement les principes de l’économie circulaire. Il permet de réduire l’empreinte carbone des aciers produits et limite les besoins de stockage de déchets TFA. Le Technocentre serait capable de traiter 25 000 tonnes de déchets TFA métalliques par an. La valorisation d’une tonne d’acier permet d’éviter l’équivalent de 57 % des émissions de CO2 et 40 % de la consommation énergétique primaire, par rapport à la production d’une tonne d’acier minier ».
L’installation prévoit différentes étapes de traitement et de contrôle pour obtenir des lingots d’acier valorisables dans l’industrie conventionnelle. Les aciers y seront décontaminés par fusion et séparation du « laitier ». En effet, le procédé permet de concentrer les substances radioactives dans le « laitier » qui se crée à la surface de l’acier en fusion. Ce procédé peut également s’accompagner d’une étape de tri et de décontamination préalable : un générateur de vapeur, par exemple, doit d’abord être décontaminé et découpé pour ne traiter par fusion que la partie valorisable. Le reliquat – environ 15 % – sera conditionné et envoyé dans un stockage de l’Andra.
Le projet prévoit une phase de concertation publique à partir de mi-2024. En cas d’accord à l’issue des instructions réglementaires, la construction du Technocentre pourrait débuter en 2027 pour une mise en service en 2031 et un fonctionnement pendant plus de 40 ans. « Ce calendrier permet de répondre à l’augmentation prévue du flux de métaux valorisables issus du démantèlement de diverses installations françaises, dont celui de l’usine d’enrichissement Georges Besse 1 d’Orano. Nous serons aussi en mesure de valoriser des métaux en provenance d’autres pays ».
L’usine permettrait aussi la valorisation du métal des 300 générateurs de vapeurs du parc nucléaire et emploierait jusqu’à 180 personnes en phase d’exploitation.
Le groupe EDF exploite déjà une unité de valorisation de métal par fusion en Suède (via sa filiale Cyclife Sweden).
Valoriser le cuivre contenu dans les câbles électriques
Les câbles électriques représentent environ 3 % en masse (10 % en volume) des déchets de très faible activité issus du démantèlement des installations nucléaires, soit une vingtaine de milliers de tonnes de câbles. Pour en extraire les matières valorisables, notamment le cuivre, et les recycler, les deux entreprises Inovertis et MTB mènent le projet Orcade (Ouverture vers un Recyclage des CÂbles électriques DÉchets issus des sites nucléaires). Ils sont accompagnés par l’Andra dans le cadre du projet « Nucléaire de demain » du programme d’Investissements d’avenir (PIA)*.
Son objet est de mettre au point une machine capable de dénuder les câbles et d’en séparer la partie métallique interne sans qu’il n’y ait ni contact ni transfert de poussière entre les parties externe et interne du câble lors du traitement. Le CEA, troisième partenaire du projet, a confirmé par une étude que les éléments radioactifs restaient alors effectivement en surface des câbles. Après dénudage, seule la gaine serait traitée comme un déchet TFA tandis que les fils de cuivre pourraient être recyclés dans l’industrie conventionnelle. Un prototype complet grandeur nature du dispositif est en cours de fabrication.
* Le Programme d’investissements d’avenir (PIA), piloté par le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI), a été mis en place par l’État pour financer des investissements innovants et prometteurs sur le territoire.
Valoriser les gravats
Parmi les autres pistes étudiées figure le recyclage des gravats béton. Il s’agit notamment d’une demande formulée par le PNGMDR, qui appelle l’Andra à produire une étude sur le sujet. En attendant, l’Agence soutient, dans le cadre du programme d’Investissements d’avenir (PIA), le projet Cyber qui propose de séparer les différents composants des gravats de béton TFA pour pouvoir les recycler : ils pourraient alors aussi être réutilisés en tant que nouveaux matériaux cimentaires.
Options et scénarios possibles : un processus de co-construction de l’avenir des déchets TFA
L’avenir de la gestion des déchets TFA se dessine dans le dialogue et la concertation : les différentes solutions que sont les stockages - centralisés et décentralisés - et la valorisation d’une partie d’entre eux sont pour l’instant des possibilités qui dépendent les unes des autres. Elles seront étudiées au cours d’un processus dit « multi-critères et multi acteurs » piloté par le ministère de la Transition écologique, et invitant à la discussion les acteurs professionnels, les associations et les citoyens, en tenant compte de critères de sûreté mais aussi environnementaux et sociétaux.
De son côté, l’Andra a remis à l’Autorité de sûreté nucléaire son « Schéma industriels pour la gestion des déchets », dans le cadre du PNGMDR 2022-2026. Ce document présente les perspectives d’évolutions et propose des combinaisons d’options de gestion.